France/Monde - Consommation
Les efforts de lutte contre le réchauffement climatique se concentrent sur le CO2. Mais la concentration du méthane dans l’atmosphère inquiète.
La hausse rapide des émissions de méthane (CH4 dans sa formule chimique) pourrait être une véritable bombe à retardement pour le réchauffement climatique.
Dans une étude menée par le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE) basé dans les Yvelines, auprès de 70 chercheurs, les experts s'alarment de l'impact de l'activité humaine dans la hausse très rapide du troisième gaz à effet de serre de l'atmosphère après la vapeur d'eau et le dioxyde de carbone (CO2).
Beaucoup plus réchauffant
Le méthane contribue en effet pour environ 20 % au réchauffement en cours de la planète. Mais il est surtout vingt-huit fois plus « réchauffant » que le CO2 tout en persistant moins longtemps dans l'air (environ dix ans).
Toutefois il est plus difficile à pister que le CO2, car plus diffus et une bonne part provient de sources « naturelles » (zones humides, formations géologiques…). Ces experts demandent donc que cette évolution soit mieux prise en compte dans les scénarios d'évolution du climat.
L'activité humaine responsable
La majeure partie des émissions est liée aux activités humaines : 36 % viennent notamment de l'agriculture (éructations des ruminants et rizières) et du traitement des déchets.
D'ailleurs les chercheurs privilégient cette hypothèse pour expliquer la hausse des émissions. En effet, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le nombre de têtes de bétail est passé de 1,3 milliard en 1994 à 1,5 milliard vingt ans plus tard. Mais ils n'excluent pas non plus le rôle des énergies fossiles dans ce boom.
Quelque 21 % des émanations de méthane sont de fait dues à l'exploitation du charbon, du pétrole et du gaz : de l'extraction jusqu'aux réseaux de distribution, les fuites de méthane sont très fréquentes. « A partir des années 2000, il y a eu une grosse exploitation du charbon en Chine, et l'exploitation du gaz aux États-Unis a aussi augmenté », souligne Marielle Saunois, enseignant-chercheur à l'université de Versailles Saint-Quentin (UVSQ) et coordinatrice de l'étude.
Des réactions en cascade
Concernant le permafrost, ces sols gelés des hautes latitudes, ils peuvent aussi dégager du méthane en dégelant, une grande crainte des climatologues.
Mais à ce stade, « on ne voit pas d'augmentation anormale des concentrations », dit le chercheur et coauteur de l'étude Philippe Bousquet, pour qui ces « émissions risquent d'augmenter dans le temps mais sur des décennies ».
Des solutions pour réduire les émissions
Il est possible d'agir très concrètement pour réduire ou capter le méthane, soulignent les scientifiques : méthaniseurs dans les fermes, modification des protocoles d'irrigation des rizières, chasse aux fuites… « On peut réduire ces émissions plus facilement, de manière moins coercitive, que celles de CO2, en encourageant aussi l'innovation et les emplois. Alors il ne faut pas s'en priver ! », insiste Philippe Bousquet.
Et Marielle Saunois conclut : « Si on veut rester sous la barre des 2°C (comme le prévoit l'accord signé à la COP21 de Paris, NDLR), il ne faut pas se contenter de limiter les émissions de dioxyde de carbone, il faut aussi réduire celles de méthane. »
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